
Après deux mois de campagnes électorales, les Allemands vont finalement aux urnes pour élire la prochaine Assemblée législative allemande surnommée le « Bundestag ». Après une année 2024 qui a vu une vague d’extrême droite déferlée en Europe, l’Allemagne représente la première grande élection de 2025. Les résultats nous permettront de déterminer si l’extrême droite continue à progresser au sein des pays occidentaux. Dans cet article, j’expliquerais les évènements qui ont mené à cette élection, les forces politiques en présence, les enjeux de cette campagne et les possibles conséquences sur l’Europe et le monde.
Une crise politique et une population en colère
Les élections législatives étaient initialement prévues pour l’automne 2025, mais le gouvernement du chancelier Olaf Scholz fut obligé de devancer les dates du scrutin à la suite de sa défaite lors d’un vote de censure. Depuis 2021, Olaf Scholz dirigeait une coalition en feu tricolore ce qui est une coalition composée de trois partis politiques : le Parti social-démocrate (SDP), le Parti libéral-démocrate (FDP) et l’Alliance 90/ Les Verts. Cette coalition perd rapidement sa popularité à cause de la récession économique qui frappe l’Allemagne et des tensions sociales en lien avec l’immigration. Lors des élections européennes de 2024, les partis formant la coalition obtiennent de faibles scores ce qui démontre une colère des Allemands très marquée. Le parti d’extrême droite l’Alternative pour l’Allemagne (AFD) obtient des résultats historiques dans plusieurs régions d’Allemagne lors d’élections régionales.
Malgré ces mauvais résultats, le chancelier souhaite effectuer son mandat jusqu’à la fin et maintient le cap vers des élections législatives à l’automne 2025. Cependant, un désaccord entre le FDP et le SDP sur la dette pousse le chancelier à limoger un ministre du FDP ce qui provoque la fin de la coalition en novembre 2024. À la suite de cet évènement, le gouvernement n’a plus la majorité parlementaire pour survivre à un vote de confiance des partis d’opposition. Le principal parti d’opposition, l’Union chrétienne-démocrate d’Allemagne (CDU), demande qu’un vote de confiance ait lieu le plus rapidement possible. Les deux partis s’entendent pour qu’un vote de confiance ait lieu le 16 décembre ce qui provoquerait des élections en février 2025. Sans grande surprise, le gouvernement de Olaf Scholz perd le vote de confiance et les élections sont déclenchées.
La droite de retour au pouvoir et une percée historique de l’extrême droite
Selon les derniers sondages, le CDU dirigé par Friedrich Merz est en tête avec près de 30% des intentions de vote. Ce parti politique se situe sur la droite du spectre politique avec des politiques conservatrices et la valorisation d’une économie de libre marché. Le SPD lui se trouve en troisième position avec seulement 15% des intentions de vote et les Verts sont proches avec l’appui de 14% des Allemands. Les deux partis sont considérés comme des partis de gauche qui préconisent un État social fort et la poursuite d’objectif de justice sociale.
La grande histoire et surprise de cette élection est la percée historique de l’AFD qui obtiendrait l’appui de 20% des Allemands. Une telle percée de l’extrême droite est sans précédent depuis la Deuxième Guerre mondiale et prouve que l’Allemagne n’est pas l’exception face à la montée du populisme dans les pays occidentaux. L’AFD est considéré comme un parti populiste d’extrême droite qui est reconnu pour ses positions anti-immigration, contre l’Union européenne et contre les mesures pour pallier les changements climatiques. À l’autre extrême de l’échiquier du politique, on retrouve l’Alliance Sahra Wagenknecht – Pour la raison et la justice (BSW). Ce parti populiste de gauche veut un État providence allemand fort, mais est résolument contre les politiques migratoires actuelles et le financement de l’Ukraine similaire à l’AFD. Les sondages donnent 5% des intentions de vote à ce nouveau parti populiste.
Une campagne électorale marquée par l’économie, l’immigration et Elon Musk
Malgré la situation économique difficile de l’Allemagne, l’immigration s’est imposée comme le sujet chaud de la campagne électorale en partie à cause de l’attentat du 13 février 2025 qui a mené à la mort de deux Allemandes. Cet attentat a été utilisé comme raison justifiant plusieurs mesures anti-migratoires particulièrement par les partis de droite. Le sentiment anti-immigrant est le moteur principal de l’ascension de l’AFD et sa possible percée historique. Ces élections ont aussi vu une ingérence inédite des États-Unis avec plusieurs interventions appuyant l’AFD de la part d’Elon Musk et du vice-président américain. Il n’est pas clair que l’appui d’Elon Musk aidera ou nuira à l’AFD, car des Allemands pourraient ne pas apprécier le milliardaire plus puissant que jamais.
Dans les dernières semaines, la guerre en Ukraine est aussi devenue un enjeu important suivant les annonces de l’administration Trump qui souhaite négocier la fin du conflit avec la Russie. L’Europe et l’Ukraine semblent être laissées de côté dans ces négociations ce qui inquiète les différents chefs d’État. Le SDP et le CDU ont réaffirmé leur soutien à l’Ukraine, mais la position de l’AFD favorise davantage la Russie. Bref, c’est une élection historique en Allemagne qui était reconnue pour ses grandes coalitions entre la gauche et la droite, car ces élections ont été marquées par des débats polarisants et peu de compromis.
L’incertitude à un moment crucial
Les résultats de cette élection auront un impact au-delà des frontières de la plus grande économie de l’Union européenne. Le prochain gouvernement allemand devra diriger une Allemagne et une Europe affaiblie face aux États-Unis plus intransigeants que jamais. Dans cette atmosphère politique tendue, les résultats de cette élection nous donneront un premier aperçu des effets de l’administration Trump chez les électeurs allemands.
Sources (information):
Deutschland.de
Les affaires
L’observatoire de l’Europe
TF1 Info
Radio-Canada
Source (image):
Pixabay