
Le soir du 3 octobre 2022, les militants libéraux rassemblés au Théâtre Corona ont l’impression de vivre dans un véritable cauchemar. La formation politique vient de connaître le pire résultat de son histoire, pratiquement cloîtrée dans l’ouest de l’île de Montréal et Laval, ses deux châteaux forts. Les militants présents, impuissants devant le raz-de-marée caquiste, sont plombés d’incertitude. Dominique Anglade, la première femme à la tête du parti, annonce ce soir-là qu’elle quitte l’ensemble de ses fonctions. Le PLQ appréhende le pire, ce qui est chose rare pour un parti marqué par plusieurs succès politiques.
Par contre, que ceux qui croient que le Parti libéral du Québec est mort se détrompent. Il faut le reconnaître: le parti a les reins solides, la ténacité et la résilience suffisantes pour se redresser. Les écarter du décor en 2026 serait faire fausse route. Depuis deux ans et demie, le PLQ cherche à tourner la page. C’est un processus qui semble très long, mais le parti veut bien faire les choses, pour ne pas revivre le même scénario. Les souliers à chausser sont immenses: Godbout, Lesage, Bourassa, Charest ont laissé leur marque sur la scène politique québécoise. Voici un portrait de la course qui se dessine, pour un parti cherchant à restaurer la culture gagnante des beaux jours.
Denis Coderre, version PLQ
Denis Coderre a été le premier candidat à confirmer son intention de briguer la chefferie du Parti libéral du Québec. C’est un gros nom, quelqu’un qui n’est pas à sa première valse. Son ton intimidant, sa confiance inébranlable et sa présence imposante ont fait sa marque de commerce. En 30 ans, Denis Coderre a occupé le rôle de député dans Bourassa, avant de se lancer à la mairie de Montréal puis élu maire en 2013. Maintenant, il tente sa chance au provincial. A-t-il des chances de l’emporter ? Si le Parti libéral veut retrouver le pouvoir, les militants et les membres voudront-ils d’un individu dont le bilan à la mairie est peu reluisant et le fait qu’il ait perdu à deux reprises face à Valérie Plante ? En tout cas, son pèlerinage à Compostelle ne l’aura pas assagi, alors que sa principale motivation pour se lancer dans la course libérale est la montée en flèche du Parti québécois de Paul Saint-Pierre Plamondon. Il est à se demander si Coderre est davantage en mission personnelle pour émousser la tendance péquiste, plutôt que véritablement aider les Libéraux à reprendre le pouvoir.
Charles Milliard, le « PSPP » des Libéraux ?
C’est le néophyte de la politique, qui en peu de temps aura réussi à gagner une crédibilité et des appuis importants qui le rend désormais un candidat sérieux. Milliard, issu du milieu des affaires, a été président-directeur général de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Il se présente comme le candidat des régions, ce qui a cruellement manqué au parti et qui a certainement expliqué la déconfiture de 2022. Le pharmacien de formation a l’appui de la Commission jeunesse du parti. Ce n’est pas rien, considérant la relance, le « reset » sur lequel la formation planche depuis quelques années. Milliard incarne le renouveau, bénéficiant d’une image encore intacte. La campagne n’en est qu’à ses premiers balbutiements, mais force est d’admettre que Charles Milliard est un candidat qui va bien performer et a définitivement le potentiel de remporter cette course à la chefferie.
Marc Bélanger, le négligé
Méconnu du grand public, l’entrée en scène de Marc Bélanger n’aura pas créé autant de murmures que ses adversaires. Il a déjà de l’expérience en politique, alors qu’il a déjà été candidat pour le Parti libéral du Canada. Fier Gaspésien, il aspire au plus haut poste du PLQ afin de redresser les finances publiques, améliorer la position économique du Québec à l’international et donner une voix aux régions. Bélanger part néanmoins derrière les autres candidats, lui qui n’a pas nécessairement occupé de fonctions importantes, tant en politique que dans son propre milieu professionnel. Mais le candidat n’a rien à perdre et peut être une option alternative intéressante pour les membres du parti.
Pablo Rodriguez et repartir sur de nouvelles bases
Député fédéral depuis deux décennies, Rodriguez a claqué la porte du Parti libéral du Canada, dans la foulée de la crise qui secoue la formation et a traversé la rivière des Outaouais. Des sondages le mettaient en position de tête, et même que ceux-ci placent le PLQ en bonne posture si Rodriguez était à sa tête. Son intégrité fait de lui un candidat jouissant d’une bonne notoriété dans la population. Il part en tête dans cette course à la chefferie. Son association avec Justin Trudeau peut rapidement devenir son talon d’Achille, alors que le navire du PLC est en train de sombrer. Rodriguez s’est alors enquis du premier canot de sauvetage à sa disposition. Il mise néanmoins sur une campagne optimiste, qui n’est pas sans rappeler ce à quoi le Parti libéral du Québec nous a habitués dans le passé. Pablo est un candidat qui peut certainement ramener le PLQ sur la bonne voie et aider le parti à bien performer en 2026.
Le fonctionnement de la campagne
En avril dernier, le parti a communiqué les modalités entourant la course à la chefferie. Tout d’abord, la phase de consultation, qui s’échelonnera jusqu’au 11 avril, vise à mousser les candidatures, qui devront être officiellement déposées d’ici cette date. Dans un second temps, la « phase communication », d’une durée d’environ deux mois, est la campagne officielle, qui sera marquée par quatre débats. Le processus de vote s’enclenchera le 9 juin prochain et culminera lors du congrès prévu le 14 juin. C’est à ce moment-là que l’identité du chef sera connue. Le système de votation préconisé est celui du pointage, alors que 250 000 points seront en jeu, répartis dans les 125 circonscriptions (2 000 pts/comté). Puis, afin que les jeunes aient une portée dans les résultats, 125 000 points seront comptabilisés en fonction des membres âgés de moins de 25 ans, répartis selon le pourcentage recueillis pour chaque candidat. (Source: Parti libéral du QC)
Sources: Patrick Doyle, La Presse canadienne (image Pablo Rodriguez) ; Ivanoh Demers, Radio-Canada (image Charles Milliard) ; Archives La Presse (image Denis Coderre) ; Sophie Lavoie, Le Quotidien (image Marc Bélanger).